#Cinéma « Du crépitement sous les néons » Très bon thriller sur fond de traite des êtres humains


Interdit aux moins de 12 ans
Synopsis
Sous contrôle judiciaire, Yann rêve d’une nouvelle vie loin de la banlieue. Pour rembourser une dette, il accepte de convoyer jusqu’en Espagne, Dara, une jeune nigériane prisonnière d’un réseau de prostitution dirigé par Sumaï. Alors que Yann est recherché de toutes parts, Dara va tenter d’échapper à son geôlier pour retrouver sa liberté…

Note 3,5/5. Thriller qui s’appuie sur une réalité : la traite des femmes dans le milieu nigérian, vouées à la prostitution. Le début du film est violent, il montre bien que ces femmes sont traitées comme du bétail. Si Yann accepte de convoyer Dara jusqu’en Espagne, il n’a pas la trempe d’un proxénète ; on le verra évoluer dans ses rapports avec Dara de manière inattendue..
Jérémie Laheurte incarne le rôle de Yann avec talent, par sa présence physique et par son jeu.
Rythme soutenu, tension permanente ; un bon polar !  

Se documenter
Pour retranscrire ce milieu avec le plus de réalisme, les cinéastes se sont rapprochés de l’association MIST qui vient en aide aux victimes de la traite des êtres humains dans le milieu nigérian. Les réalisateurs précisent : "Ils font des maraudes, vont au contact de ces filles pour les extirper des réseaux, porter plainte contre les proxénètes, ils les mettent en lien avec des avocats."

Entretien avec les réalisateurs FGKO (Fabrice Garçon et Kevin Ossona)
DÈS 2018, VOUS COMMENCEZ À TRAVAILLER SUR DU CRÉPITEMENT SOUS LES NÉONS.
Kevin
On a écrit plusieurs scénarios après Voyoucratie mais Du crépitement sous les néons était celui qui nous emballait le plus. Pour un second film cela avait du sens car ça restait proche de notre univers, et il y avait une promesse d’évasion à travers le road trip et une histoire sentimentale entre deux personnages que tout oppose.

Fabrice
À cette époque je cherchais des romans inspirants et je suis d’abord tombé sur le bouquin Bienvenue en banlieue de Rémy Lasource. J’ai vraiment accroché sur cette histoire qui raconte le quotidien d’un jeune flic qui débarque en banlieue, décrit avec humanité ce qu’il pouvait expérimenter, le meilleur comme le pire. C’était puissant. Et je lis un autre de ses livres, Du crépitement sous les néons, qui parle de banlieue, de prostitution, de traite d’êtres humains… C’est très réaliste et incroyablement documenté. Je commence à voir des images qui se créent dans ma tête et je me dis qu’il y a un truc à faire. Mais l’adaptation n’est pas si évidente car transformer le roman en film avec une intrigue forte et du rythme nous demande de réinventer certaines choses. Le plus important pour nous était de garder les caractéristiques et le background des deux protagonistes principaux ainsi que l’atmosphère sombre et réaliste du roman

 Du crépitement sous les néons de Fabrice Garçon et Kevin Ossona

POURQUOI S’ÊTRE INTÉRESSÉ À LA TRAITE DES ÊTRES HUMAINS ET COMMENT AVEZ-VOUS ABORDÉ CE MILIEU ?
Fabrice
Nous vivons une époque où des hommes au sens large continuent de décider du sort d’autres, uniquement pour servir leurs intérêts et sans la moindre compassion. Cela concerne les milieux les plus précaires mais c’est aussi le reflet de la société actuelle où l’homme tend à devenir une valeur marchande comme une autre, avec un prix. Les réseaux de prostitution nigérians existent ici en France, à Paris et dans sa banlieue et nous estimions que cela n’avait pas encore été traité dans le cinéma ; c’est pourquoi nous voulions mettre la lumière sur ce phénomène. Afin de retranscrire ce milieu avec le plus de réalisme, nous nous sommes rapprochés de l’association MIST (Clément Sibony et Vanessa Simoni) qui vient en aide aux victimes de la traite des êtres humains dans le milieu nigérian. Ils font des maraudes, vont au contact de ces filles pour les extirper des réseaux, porter plainte contre les proxénètes, ils les mettent en lien avec des avocats. Nous avons pu échanger avec ces femmes, d’anciennes prostituées, victimes de la violence des réseaux qui ont partagé avec nous leurs périples depuis le Nigeria, à travers l’Italie, la traite, la violence, les addictions… Elles ont même coaché nos comédiens pour la langue (le Pidgin) parlée dans le film par certains de nos protagonistes dont Tracy et Fulgence Mvemba. Ces femmes fortes devant vivre avec un passé douloureux, nous ont apporté leur vérité, leur travail sur le film a été très précieux. On y a été très sensibles. Nous avons aussi travaillé avec Rémy Lasource, l’auteur du livre dont est adapté le film qui travaille en tant que commandant de police et qui lutte contre ces réseaux mafieux. Ces deux regards différents nous ont permis d’être le plus neutre et objectif possible.
Du crépitement sous les néons de Fabrice Garçon et Kevin Ossona

VOTRE PERSONNAGE PRINCIPAL QUI EST UN JEUNE DE CITÉ PLONGÉ DANS LA DÉLINQUANCE SEMBLE MALGRÉ TOUT EN DÉCALAGE AVEC LES AUTRES DE SA BANDE, COMME ISOLÉ OU REJETÉ. QU’AVEZ-VOUS CHERCHÉ À EXPRIMER À TRAVERS SON ATTITUDE ET SA MARGINALITÉ ?
Fabrice
C’est ce qui nous a plu à la lecture du roman de Rémy Lasource, un jeune en souffrance avec un père absent et qui se sent étranger dans sa propre cité. Nous trouvions cela intéressant pour motiver son départ, accélérer sa fuite en avant et puis il traduit également le mal être qu’il y a dans les quartiers abandonnés par la République. Cela produit forcément un sentiment d’injustice et peut conduire à une forme de haine et d’esprit de révolte.

EST-CE POUR VOUS REPRÉSENTATIF DES JEUNES DE BANLIEUES ACTUELLEMENT ?
Kevin
Il ne faut jamais faire de généralité ni être trop fataliste mais il ne faut pas non plus être dans le déni. La délinquance, la violence, la haine sont les symptômes d’une société malade et les banlieues sont un bon indicateur de la température en France. À une époque où les pouvoirs publics auraient pu se saisir des enjeux qu’il y avait dans les quartiers, le constat est que la situation ne s’est pas vraiment arrangée voire même dégradée. Nous vivons actuellement dans un monde où les tensions s’accentuent, le spectre de la guerre plane au-dessus de l’Europe, il y a une recrudescence des violences gratuites…

POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DU PERSONNAGE DE DARA ET COMMENT VOUS VOUS ÊTES INSPIRÉS POUR RETRANSCRIRE LA RÉALITÉ DES VICTIMES DE CES RÉSEAUX DE PROSTITUTION ? 
Kevin
Pour Dara nous étions dans une situation complexe car son personnage de départ est une victime et nous voulions donner une autre image de la femme, la rendre forte et proactive dans le récit. Nous avons rencontré une ancienne prostituée nigériane depuis qui nous a raconté son histoire et qui nous a beaucoup inspiré pour le rôle. Plus tard, la comédienne Tracy Gotoas a pu passer du temps avec elle et s’imprégner aussi de son vécu pour donner plus de crédibilité à son personnage et son interprétation.

Distribution
Jérémie Laheurte
Tracy Gotoas
Bosh

Sortie le 16 novembre





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