#Exposition « Top secret : cinéma et espionnage » à la Cinémathèque française du 21 octobre au 21 mai


De Mata Hari à Malotru, de James Bond à Edward Snowden, l’exposition lève le voile sur les espions, héros romanesques par excellence, dont l’univers nourrit depuis toujours l’imaginaire des plus grands cinéastes. Épousant les convulsions de l’Histoire et les évolutions technologiques d’un siècle d’espionnage, le parcours célèbre un genre, ses codes et ses figures intrépides, telles Marlene Dietrich et Hedy Lamarr, actrices majeures du renseignement anti-nazi. Grandes Guerres et conflits contemporains, cryptologie et cyberspy : émaillée de gadgets, archives, costumes, artefacts historiques et œuvres d’art, une histoire de l’espionnage au cinéma, ludique et érudite.

Résistant aux stéréotypes, l’exposition Top Secret déconstruit la représentation sexiste des espionnes, longtemps reléguées à la seule pratique du « piège à miel », et rétablit leur apport stratégique considérable, ce à quoi le cinéma a su précocement rendre justice. De Protéa, férue de jiu-jitsu et première espionne de l’histoire du cinéma (1913), à Mata Hari, fusillée pour intelligence avec l’ennemi allemand (interprétée dès 1931 par Greta Garbo, plus tard immortalisée dans ce rôle par Andy Warhol), le cinéma s’est intéressé, dès ses origines, aux figures de femmes agents secrets : Marthe Richard ou Mademoiselle Docteur sont des héroïnes dont les aventures sur grand écran reposent sur des faits réels, tandis qu’Alicia Huberman (interprétée par Ingrid Bergman) dans Les Enchaînés (1946) incarne, devant la caméra d’Alfred Hitchcock (le maître incontesté, en dix films majeurs, du cinéma d’espionnage), un fantasme fictionnel de femme infiltrée et courageuse. Par ailleurs, de nombreuses stars ont véritablement profité de leur notoriété pour s’engager par patriotisme au sein des services de renseignement : Marlene Dietrich, l’Agent X27 de Josef von Sternberg (1931), a espionné quelques dignitaires nazis pour le compte de l’Office of Strategic Services (OSS) américain. Les risques pris par ces actrices (comme Hedy Lamarr, à l’origine du futur GPS, et dont l’artiste Nina Childress a exploré en sculpture les multiples facettes) permettent de réévaluer l’importance des femmes dans l’art du renseignement et témoignent, par comparaison, de la manière dont certains ont longtemps déformé cet engagement, en privilégiant l’hypersexualisation du sexpionnage.

UNDERCOVER
L’espionnage n’est donc pas plus réductible à un genre qu’il ne l’est à un médium artistique : cherchant toujours à se réinventer, il passe de la littérature au cinéma (de nombreux films montrés dans l’exposition sont des adaptations de livres de Ian Fleming, Graham Greene ou Tom Clancy), et du design à l’art contemporain. L’exposition orchestre ainsi des propositions visuelles, ludiques ou parfois volontairement dérangeantes, du Canadien Rodney Graham, de l’Ukrainien Boris Mikhaïlov, du Français Julien Prévieux, du Serbe Nemanja Nikolić, du Libanais Walid Raad (The Atlas Group), ou de l’Américaine Heather Dewey-Hagborg, qui interrogent par leurs œuvres d’art la cryptologie, le simulacre, voire le lavage de cerveau. Autant de thèmes mystérieux et fascinants qui font de l’espion le personnage romanesque par excellence, réceptacle des fantasmes des cinéastes.
Capable de glisser d’une identité à l’autre, l’espion ne cesse de se dissimuler et de se grimer tel un acteur aux talents hors normes. Tantôt invincible, tantôt torturé, il hante autant le cinéma d’auteur (Conversation secrète, Francis F. Coppola, Palme d’or en 1974) que le cinéma de série B (Un espion de trop, Don Siegel, 1977) ; es comédies humoristiques (Modesty Blaise, Joseph Losey, 1966) que les thrillers engagés (Espions sur la Tamise, Fritz Lang, 1944). Son aura populaire culmine dans les années 1960, quand les tensions de la guerre froide sont au plus haut. À l’opposition diplomatique entre les deux blocs, le cinéma d’espionnage occidental répond par une propagande qui n’hésite pas à vanter la liberté individuelle et l’opulence des biens de consommation. Ex-espion au sein du MI6 britannique devenu célèbre écrivain, John le Carré n’hésite cependant pas à démontrer que ce manichéisme sommaire traduit en profondeur l’interdépendance entre espion et espionné, entre Ouest et Est, rejouant ici la dialectique du maître et de l’esclave. Situant ses intrigues des deux côtés du Mur, l’écrivain s’est toujours documenté avec précision sur les Sûretés d’État communistes, avant de les réinventer dans la fiction. Ainsi imagina-t-il dans La Taupe (publié en 1974 et adapté au cinéma par Tomas Alfredson en 2011) l’agent soviétique Karla sur le modèle de l’implacable Markus Wolf, directeur des renseignements extérieurs de la Stasi. L’une des particularités de la guerre froide est ce dialogue incessant, par fictions interposées, entre Est et Ouest qui en venaient à s’instruire, grâce aux films, sur l’état d’esprit et les avancées technologiques du camp ennemi.

SUR ÉCOUTE
Top Secret accompagne donc aussi la très sérieuse marche de l’Histoire, et expose le rôle du cinéma comme instrument de propagande ou de formation des espions. Parce que l’enregistrement du réel se révèle un art nécessaire à l’agent secret, les techniques de captation cinématographiques se retrouvent au cœur des pratiques d’espionnage. Cinéma et espionnage partagent donc – l’art et la technique – de produire des sons et des images, agencés ensuite pour former un récit. Le cœur de ce territoire commun consiste donc en de nombreux appareils performants qui servent à l’accomplissement de leurs tâches : caméras, Nagra, micros aident à la filature des uns et au tournage des autres. L’exposition en montrera de rares originaux, certains datant même du XIXe siècle.

Mais en ce début de XXIe siècle, chacun peut, avec un simple téléphone portable, collecter ou pirater des informations sensibles, tout en déjouant les systèmes de surveillance de l’État. Pas besoin d’être un super-héros cascadeur à la Mission impossible (série et films, 1966-2017) pour y parvenir. Un cinéma engagé, plus minoritaire, témoigne de ces nouvelles pratiques, érigeant en chef de file fictionnel le geek Jason Bourne, interprété par Matt Damon dans les cinq films de la saga inaugurée par La Mémoire dans la peau en 2002. Ex-agent de la CIA devenu renégat, il est l’incarnation du justicier solitaire contemporain qui défie les nouveaux maîtres du monde lors de scènes d’action filmées caméra à l’épaule. Dans la réalité, ces modèles sont à chercher du côté des citoyens-espions Chelsea Manning ou Edward Snowden, qui font le choix de partager en temps réel devant une caméra des informations classées top-secrètes (Citizenfour, réalisé par la militante Laura Poitras, Oscar du meilleur documentaire, 2014).

Aujourd’hui, ces pratiques d’enquête sont également revendiquées par des artistes engagés : c’est le cas de Trevor Paglen, dont les photographies télescopiques mettent en lumière les activités illicites de surveillance perpétrées par les USA. Avec ce nouveau millénaire, alors que certains pensaient l’espionnage relégué à des parodies hilarantes à la OSS, l’opposition entre les nouvelles forces en puissance démontre combien l’art du renseignement est plus que jamais d’actualité, soulevant des questions éthiques et politiques, tout en produisant des formes artistiques et critiques inédites.

Alexandra Midal et Matthieu Orléan, commissaires de l’exposition

 Hedy Lamarr

AU FIL DE L’EXPOSITION

1- ESPIONNAGE ET CINÉMA : UNE HISTOIRE DE TECHNIQUES
L’agent secret, personnage mystérieux, support de tous les fantasmes et de toutes les ambiguïtés romanesques, accompagne souvent la marche de l’Histoire. Tantôt invincible, tantôt torturé, l’espion hante le cinéma d’auteur autant que de série B.
En racontant la relation féconde entre espionnage et cinéma, cette exposition invite à découvrir une nouvelle histoire du cinéma.

PHOTOGRAPHIER
Comment photographier et filmer des individus dans la rue sans qu’ils s’en aperçoivent, et préserver l’authenticité de la prise de vue ? L’appareil photographique se dissimule dans bijoux, livres, stylos, cravates... Les techniques de l’espionnage industriel et militaire permettent à l’oeil indiscret des espions de capturer des informations secrètes, de l’appareil photo de L’Affaire Cicéron au Minox miniature de Bond. Ces films représentent le fantasme absolu : voir sans être vu.

ÉCOUTER
Poids plume, les enregistreurs de voix comme le Nagra permettent aux espions, aux reporters comme aux cinéastes de restituer des enregistrements exceptionnels. On retrouve ce type d’enregistreur dans Conversation secrète (Palme d’or 1974) qui permet au personnage interprété par Gene Hackman de découvrir un complot… avant de comprendre qu’il est lui aussi soumis à un panoptique sonore.


CRYPTER ET DÉCRIPTER
Créée en 1919 mais principalement utilisée par l’Allemagne nazie, la machine électromagnétique portative Enigma incarne la cryptologie moderne. Elle était réputée inviolable jusqu’à ce que le mathématicien britannique Alan Turing parvienne à déchiffrer son code.
L'Espion qui venait du froid Martin Ritt 1965 

BRIEFS ET DÉBRIEFS
Au sein du renseignement, le cinéma est un outil d’investigation essentiel. Pour refléter cette réalité, les fictions cinématographiques regorgent de séances de projections comme dans La Lettre du Kremlin de John Huston (1970) qui inaugure cette boucle d’extraits. Avec Minority Report (Steven Spielberg, 2002) qui la clôt, le personnage interprété par Tom Cruise traque des informations sur des écrans tactiles immatériels, livrant une réflexion sur la place omniprésente des images dans le monde d’aujourd’hui.

2- CLANDESTINES DES GRANDES GUERRES (1914-1945)
De Protéa, férue de jiu-jitsu et première espionne de l’histoire du cinéma, à Mata Hari fusillée pour intelligence avec l’ennemi allemand, le cinéma aime opérer des gros plans sur les femmes agents secrets. Marthe Richard, la Chatte, ou Mademoiselle Docteur sont autant d’héroïnes inspirées de véritables espionnes, tandis qu’Alicia Huberman, interprétée par Ingrid Bergman dans Les Enchaînés de Hitchcock, est un pur fantasme fictionnel de femme infiltrée.
Pendant les deux Guerres mondiales, de nombreuses stars ont profité de leur aura pour travailler au sein des services de renseignement ; Joséphine Baker lors de ses voyages passe des informations classées au BCRA français (Bureau central de renseignements et d'action), et Marlene Dietrich, qui joue l’Agent X27 à l’écran, espionne les nazis pour le compte de l’OSS américain (Office of Strategic Service).

MATA HARI
Née en 1876 aux Pays-Bas, Margaretha Geertruida Zelle était agent-double et effeuilleuse de luxe, sous l’exotique nom de scène de Mata Hari. Condamnée pour espionnage par l’état-major français, elle est fusillée à la forteresse de Vincennes le 15 octobre 1917. Si la vérité sur son compte risque de n’être jamais établie, son personnage glamour, incarné par les plus belles actrices du monde, a imposé une mythologie du sexpionnage au cinéma et dans les arts plastiques.

HEDY LAMARR
Née en 1915 en Autriche, Hedy Lamarr crée le scandale à 18 ans pour avoir interprété le premier orgasme de cinéma dans Ecstasy (Gustav Machatý, 1933). En 1942, avec le pianiste George Antheil, elle dépose un brevet qui fait coïncider torpilles et fréquences hertziennes… et l’offre à l'armée américaine qui refuse. Lamarr a contribué significativement à l’effort de guerre ; son invention a permis de développer de nombreux systèmes de communication contemporains, dont téléphone portable, Bluetooth, et GPS !

SONIA ET LES ESPIONNES DE LANG
Fritz Lang écrit le scénario des Espions (1928) avec sa femme, la romancière Thea von Harbou, : en mai 1927, des policiers ont perquisitionné à Londres le siège de la compagnie commerciale Arcos, soupçonnée de dissimuler une officine secrète communiste. Cela aboutira à la rupture des relations diplomatiques entre le Royaume-Uni et l’URSS. Lang y met en scène la séduisante Sonia, chargée de piéger les membres de l’état-major allemand au profit du diabolique Haghi, qui règne sur un réseau d’espions fanatiques.


HITCHCOCK ET LE FILM D’ESPIONS : LE GENRE IDÉAL
À partir de 1934, Alfred Hitchcock tourne coup sur coup 5 films d’espionnage trépidants qui posent les bases du « film hitchcockien » : L’Homme qui en savait trop (1934), Les 39 marches (1935), Quatre de l’espionnage (1936), Agent secret (1936), Une femme disparaît (1938).

Une fois installé aux États-Unis, le cinéaste perpétue cette veine. Après Correspondant 17 (1940) et Cinquième colonne (1942) ‒ deux films de poursuite à la manière des 39 marches ‒, Les Enchaînés (1946) renouvelle la donne : un suspense intense, une unité de lieu, une héroïne contrainte de jouer double jeu, un « MacGuffin » en forme de bouteille de Pommard...

Dans une seconde période (1956-1969), il réalise 4 nouveaux films d’espions : un auto-remake de L’Homme qui en savait trop (1956) ; La Mort aux trousses (1959), chef-d’oeuvre du genre et énième reprise des 39 marches à l’échelle du continent américain ; enfin Le Rideau déchiré (1966) et L’Étau (1969), deux films « gelés », guerre froide oblige.
Hitchcock fait du film d’espions un genre idéal, capable d’embarquer en même temps action et amour, et de « véhiculer » (par air, route ou rail) une double intrigue policière et sensuelle.

3- HÉROS DES DEUX BLOCS (1945-1989)
Le cinéma d’espionnage de l’après-guerre s’installe pour plus de 40 ans dans une bipolarité idéologique opposant le bloc démocratique de l’Ouest au bloc communiste de l’Est, selon la règle d’or scénaristique : CIA + MI6 vs. KGB + Stasi.
Filmés par les plus talentueux cinéastes hollywoodiens (Hitchcock, Mankiewicz, Huston, Mann, Peckinpah), de super-espions résolvent les pires conflits diplomatiques sous couvert d’une paix apparente. 
L'Affaire Cicéron Joseph L. Mankiewicz 1952

Cette ère du Mythe est symbolisée à la perfection par le British James Bond, matricule 007. Affrontant aussi bien des agents soviétiques (de Bons Baisers de Russie à Goldeneye), que des membres de la société criminelle du Spectre, le loyal agent 007 est suivi à l’écran d’une cohorte d’ersatz : le débonnaire Harry Palmer, la comic-strip Modesty Blaise, le parodique OSS117, ou le psychédélique Derek Flint.

BLOC DE L’OUEST
Au cours de la Guerre froide, le cinéma fait la guerre sous couvert de divertissement. Berlin incarne l’enclave stratégique où s’affrontent le capitalisme et la CIA, d’une part et le communisme et le KGB, de l’autre.
À l’Ouest, le cinéma d’espionnage sert de vitrine à une propagande qui n’hésite pas à vanter la liberté individuelle et l’opulence des biens de consommation introuvables à l’Est, dans un système d’opposition parfois caricatural.
L’ex-espion devenu romancier d’espionnage John Le Carré démontre, par ses romans fréquemment transposés à l’écran, que cette dualité traduit l’interdépendance entre espion et espionné, entre espion de l’Ouest et de l’Est, rejouant la célèbre dialectique du maître et de l’esclave.

GADGÉTOLOGIE
L’intelligence, l’humour et le succès de James Bond tiennent aussi à la profusion de ses gadgets. Ces merveilles technologiques qui oscillent entre réalité et fiction sont imaginées par « Q » (pour Quartier-Maître), le plus célèbre maître-armurier du cinéma. Objets de design et armes cachées de fiction, dans les James Bond ou autres films, sont ici mêlés à de véritables accessoires fournis à leurs agents par les services secrets français, anglais et russes, ainsi qu’à des prototypes jamais utilisés !

BLOC DE L’EST
Au tournant des années 90, des cinéastes comme John McTiernan et Fred Schepisi ont eu l’audace de demander à Sean Connery, interprète fondateur de James Bond, de passer à l’Est : c’est ainsi qu’il joue le commandant soviétique du sous-marin Octobre Rouge, prêt à la défection ; puis un éditeur anglais de connivence avec le KGB dans La Maison Russie, filmé à Moscou et adapté d’un roman de John Le Carré.
L’écrivain comme le cinéaste se sont documentés avec précision sur les Sûretés d’État communistes. Dans La Taupe (publié en 1974 et adapté au cinéma par Tomas Alfredson en 2011), Le Carré façonne le personnage de l’agent soviétique Karla sur le modèle du directeur des renseignements extérieurs de la Stasi, l’implacable Markus Wolf.

LES ARCHIVES DE SIMON MENNER
«Le ministère de la Sécurité d'État de la République démocratique allemande (Stasi) était l’un des appareils de surveillance les plus efficaces du monde. Après la chute du mur de Berlin, la plupart de ses archives ont été ouvertes au public. Pendant deux ans, j’ai pu mener des recherches sur l'héritage visuel de ce service de renseignement au sein du Commissariat fédéral des archives de la Stasi de l’ancienne RDA (BStU). Il s’agit d’archives photographiques documentant la répression exercée par l’État pour soumettre ses citoyens.
Naturellement, la présentation de la plupart de ces images est une arme à double tranchant dans la mesure où beaucoup d’entre elles représentent une intrusion abusive dans la vie privée des personnes observées. Je suis convaincu que ces images contribuent au débat sur la nature des systèmes de surveillance approuvés par l'État. Et cette mission revient peut-être davantage aux artistes – sans doute mieux placés que les historiens – pour souligner, sans ambiguïté, les liens avec la société actuelle. »
Le pont des espions de Steven Spielberg 2014

TERREUR ET TERRORISME (1975-2020)
Le monde duel de la Guerre froide a fini par engendrer des espions mimétiquement bipolaires, au bord de la folie comme Carrie Mathison dans la série Homeland, créée en 2011 : des agents brisés, manipulés, souvent discrédités par les officiers mêmes qu’ils pensaient servir.

S’installe un univers cinématographique démystifié, cerné d’agents doubles et de transfuges, qui propulse ses personnages dans le règne anxiogène de la désillusion et de l’opacité inauguré par Les Trois Jours du Condor (Sydney Pollack, 1975) : dans un climat post-Watergate, l’analyste d’une unité clandestine de la CIA (Robert Redford) est trahi par son propre camp.

L’ère du soupçon devient le paradigme de nombreux films d’espionnages construits comme de purs thrillers paranoïaques, de Conversation secrète (Coppola) à La Sentinelle (Desplechin). Ils exhibent la réalité brutale et sordide du renseignement, rouage inhumain d’un vaste système où le simulacre est roi.
La sidération devant ces dystopies vaut celle éprouvée devant des films inspirés de faits réels : dans Zero Dark Thirty (2012), récit méticuleux de la traque clandestine de Ben Laden par la CIA, Kathryn Bigelow met volontairement le spectateur face à des scènes d’une extrême violence.

ESPIONS EN SÉRIES
Les showrunners d’aujourd’hui ont fait de l’espionnage un de leurs sujets de prédilection. Certaines séries affrontent les moments les plus troubles des années 1970-80 : The Spy avec Sacha Baron Cohen en agent du Mossad dangereusement infiltré en Syrie avant que n’éclate la Guerre des Six Jours ; ou Carlos d’Olivier Assayas racontant les cavalcades sanglantes du Vénézuélien Ilich Ramírez Sánchez, héraut du terrorisme international.

LE CITOYEN-ESPION
Le chef de file des citoyens-espions est le geek Jason Bourne, interprété par Matt Damon dans les 5 films de la série du même nom, à partir de 2002. Ex-agent de la CIA devenu renégat, il est l’incarnation contemporaine du justicier solitaire et défie les puissants lors de scènes d’action filmées caméra à l’épaule.
Dans la réalité, les modèles de Bourne sont à chercher du côté des lanceurs d’alerte non-affiliés comme Edward Snowden ou Chelsea Manning, qui ont leur seule morale pour ambition.
OSS 117 : Le Caire, nid d'espions Michel Hazanavicius 2006



Commentaires