#Cinéma «Habités». Documentaire de Séverine Mathieu qui met à l’honneur la santé mentale


Synopsis

"Habités" raconte la rencontre de la réalisatrice avec quatre habitants de Marseille qui vivent entre raison et déraison. Considérés comme «fous» par la société, ils demeurent néanmoins en ville.
Entre des périodes dʼhospitalisation, accompagnés par des soignants, ils tentent de sʼélancer vers le monde commun.
Des fuites, des arrêts, des tentatives…
Ils sʼefforcent dʼhabiter, dʼêtre présents, alors quʼils sont eux-mêmes habités, inspirés. Riches de leur lucidité particulière, ils sʼarriment à notre réalité ; ils en connaissent une autre.
Le film suit dans la ville la chorégraphie singulière de leur corps.
Il nous offre lʼespace où nous pouvons ensemble jouer avec leur folie.

 «Habités». Documentaire de Séverine Mathieu
Avis
"Habités" parle à tous. Alors entrez dans la salle et plongez dans l'univers, vous rentrez au bercail avec de la poésie en tête et votre point de vue sur la folie sera modifié en profondeur.
Virginie Lehmann Centre hospitalier Edouard Toulouse de Marseille

Séverine Mathieu se tient comme à coté, pas en face pas de leur côté mais au plus près dans une relation de confiance mais aussi d’exigence, comme si maintenant que la caméra est là, il fallait s’y mettre reprendre les discussions éparse pour les faire aboutir.
Denis Gheerbrant cinéaste

Ce film me touche et me bouleverse car il touche à la question de l’humain. Séverine Mathieu a su leur donner, au-delà de la parole, la place de citoyens comme les autres.
Dolorès Torrès Psychiatre des hopitaux

«Habités». Documentaire de Séverine Mathieu
Entretien avec la réalisatrice Séverine Mathieu
Quel a été le processus d'écriture avec les personnes filmées ?
Pendant 3 ans, nous nous sommes assis autour dʼune table, une fois par semaine. «Nous» ce sont les personnes avec lesquelles je voulais faire le film, cʼest à dire des usagers de la psychiatrie, comme on dit, et aussi les soignants et lʼassistante à la réalisation, Aurore Plaussu.
Nous parlions de notre façon dʼhabiter le monde, plus précisément de la façon dont chacun habite chez soi et par extension habite son quartier, puis cette ville quʼest Marseille. Egalement comment chacun habite son corps et sa tête.
J'arrivais à chaque fois avec une thématique, comme par exemple, nos itinéraires dans la ville ou les relations amoureuses. Ma demande était dʼemblée quʼils me racontent des moments de lʼordre de la scène, quʼils soient dʼemblée en mode narrateurs, dans du récit afin quʼon construise ensemble celui du film. Pour cela il fallait quʼils comprennent comment sʼécrit un film.

Tu avais déjà l'idée du film avant de commencer l'atelier d'écriture ?
Oui le film est premier, l'atelier était un moyen dʼarriver à lui. Je cherchais à ce quʼon circonscrive ensemble des scènes, soit de leur quotidien de lʼépoque, soit de moments passés qui avaient structuré leur trajet dans la maladie mentale. C'est pour cela que la matière du film est hybride, avec des scènes de leur quotidien en cinéma direct et des reconstitutions de moments passés. Par exemple la scène où Nicolas retourne dans la chambre d'isolement, cʼest un des moments décisifs de son parcours. Cʼest pareil avec Khadidja, on a choisi ensemble de reconstituer la façon dont elle a habité ce local à poubelles. Je reconnais que j'ai une part prépondérante dans la décision bien sûr mais ils étaient toujours libres d'inventer des scènes.
Il nʼy avait pas dʼinjonction à la vérité. Je ne leur disais pas «raconte-moi exactement ce que tu es» je disais plutôt : «raconte-moi tes souvenirs ou tes rêves ou bien imaginons ensemble des scènes».
Il y avait toujours une possibilité d'esquiver la question de la vérité. Je pense que la scène où Kadidja va se baigner est plus de lʼordre de son fantasme que de sa réalité.
Ensuite, dans la phase de tournage, ils pouvaient m'appeler pour me proposer ou me demander de faire telle ou telle scène. Les 3 années dʼécriture leur avaient permis de comprendre quelle était mon intention globale, de façon à ce quʼils soient le plus actifs, ou acteurs, possible.
Wilfreed a été nettement force de proposition à ce moment parce quʼil avait envie de se mettre en scène et de mettre en scène les résidents du Marabout, le foyer où il habitait. Il avait une vraie idée de ce quʼil voulait montrer.
 «Habités». Documentaire de Séverine Mathieu
Tu mènes un travail de cinéma en psychiatrie depuis de nombreuses années et tu fais des films d'atelier avec les patients et les soignants. Quels sont les ponts ou les différences entre ces films et «Habités» ?
«Habités» est à la fois héritier de ces ateliers et en même temps lʼinverse. Ces ateliers mʼont permis de vivre au contact des participants et cela m'a fait comprendre que leur sensibilité mʼétait très nécessaire. J'aime voir le monde avec leurs yeux.

Le film a été long à trouver sa forme finale, le montage a pris du
temps. Pendant un moment avec Laureline Delom, une des deux monteuses du film vous avez essayé dʼentremêler les histoires.
Cʼétait d'ailleurs écrit ainsi mais ça ne marchait pas. Peux-tu nous expliquer pourquoi ?
Et du coup comment vous avez fait le choix avec Gilles Volta qui a fini le montage de ne rien entremêler si ce n'est à la fin du film de revenir sur deux des personnages ?
Avec le recul je crois que le montage entremêlé de ces quatre histoires ne marchait pas parce que chacune des personnes filmées porte un monde trop plein, trop fort. Ça aurait peut-être marché si on avait vraiment traité un sujet. Par exemple la question du logement. Ce sujet est dans le film mais je l'ai traité en plongeant tellement dans chacun des mondes, en entrant dans chacune des sensibilités que par conséquent les enchainements d'un monde à l'autre ne marchaient pas au montage. Ils sont trop différents les uns des autres.
Si nous avions réussi à trouver une problématique ou des problématiques communes, le film aurait gardé une sorte de rationalité qui est la mienne, la nôtre, celle de la raison. Elle les aurait un peu instrumentalisés et regardés avec plus de distance. Le choix de ce montage par blocs impliquait de quitter le bord de la raison pour basculer dans leurs regards, dans leur point de vue et donc éviter le surplomb.
Au fond, je demandais ça depuis le début du projet, je ne demandais quʼà découvrir leur monde.

Sortie le 19 octobre

Habités - Bande Annonce from Les films du Carry on Vimeo.

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