#Critique "A Perfect Enemy". Thriller psychologique maitrisé, adapté du roman "Cosmétique de l'ennemi" d'Amélie Nothomb.
Un célèbre architecte est interpellé par une mystérieuse jeune femme dans un aéroport parisien. Elle est si envahissante qu’elle lui fait rater son vol. Il va réaliser, au fil des heures, que leur rencontre n’est pas due au hasard…
Note 3,5/5. Libre adaptation du roman "Cosmétique de l'ennemi" d'Amélie Nothomb.
Partant d’une situation réaliste (une jeune femme importune un homme qui veut attendre tranquillement son avion), on glisse insensiblement vers un cauchemar. Ce thriller psychologique de Kike Maillo, à l’esthétique soignée, est très bien maîtrisé, servi par le beau jeu des deux acteurs principaux Athena Strates et Tomasz Kot
A Perfect Enemy de Kike Maíllo |
"À une époque où nous nous exhibons en permanence, je souhaitais, avec A PERFECT ENEMY, parler des monstres que nous gardons dans nos placards. Sur les péchés que nous essayons de cacher aux autres et à nous-mêmes.Ces défauts que nous balayons sous le tapis en espérant quepersonne ne les fera jamais sortir."
Kike Maíllo
"Cela a été un grand défi d’adapter un roman à succès comme Cosmétique de l’ennemi d’Amélie Nothomb, qui est essentiellement un brillant dialogue entre deux personnages se déroulant dans l’aéroport Charles de Gaulle à Paris, et de le faire également en coproduction entre trois pays, avec des acteurs, des créateurs et des techniciens du monde entier, coordonnés et travaillant ensemble pour faire, à mon avis, un grand thriller psychologique qui est divertissant, différent et dérangeant."
Le producteur Toni Carrizosa
Entretien avec le réalisateur Kike maillo (extraits)
Comment en êtes-vous venu à adapter Cosmétique de l’ennemi, le roman d’Amélie Nothomb dont est tiré A PERFECT ENEMY ?
Je cherchais une histoire à raconter et, il y a six ans, je tombe sur Cosmétique de l’ennemi que je trouve incroyable. Les droits étaient alors pris mais, deux ans plus tard, l’éditeur me rappelle et me dit qu’ils sont à nouveau disponibles. J’adorais cette histoire entre ces deux personnages. Si le personnage de Texel était très dessiné, nous avons cherché à construire davantage celui de l’architecte qui, dans le roman, est un businessman. Nous l’avons défini comme un homme très politiquement correct, avec lequel il est facile d’être en empathie.
Alors que dans le roman, les deux protagonistes sont des hommes, vous avez décidé de faire de celui de Texel une femme. Pourquoi ce changement ?
D’abord pour rendre moins évident le dénouement de l’histoire. Mais aussi parce que j’avais envie, dans le film, d’un personnage de femme qui rende la justice. Et, qui, en l’occurrence, rende la justice pour une autre femme. Cela m’intéressait aussi d’élaborer une héroïne sociopathe. Autant, au cinéma, on a l’habitude de voir des hommes dans ce type de rôles autant les femmes, on n’en voit quasiment pas.
Enfin, dans le roman, le sujet est le double, ce qui rend logique le fait que les deux héros soient des hommes. Or moi, dans le film, je voulais plutôt traiter du sujet du fantôme. Texel est en connexion avec ses monstres intérieurs, avec ses propres peurs. En ce sens, elle est complètement à l’opposé de Jeremiasz qui, lui, ne veut pas regarder ce qui se cache dans ses placards intimes. Une scène au début du film en témoigne : il efface des commentaires qui lui sont défavorables sur Internet. Cela nous semblait intéressant qu’une femme le confronte, que ce soit elle qui démolisse la façade qu’il s’est construit. À ses côtés, le héros fait une sorte de voyage pour se comprendre lui-même...
A Perfect Enemy de Kike Maíllo |
Dans la façon dont vous le formulez, cette thématique évoque le fameux Conte de Noël de Charles Dickens, dans lequel Scrooge, un vieil avare, reçoit la visite de trois fantômes qui viennent l’éclairer sur ses travers, ses côtés sombres...
On ne m’avait pas encore évoqué cette référence, mais oui, c’est très proche, effectivement. À travers ses histoires très sombres, Texel lui parle de sa vie. C’est d’ailleurs le pouvoir des contes : s’il vous touche, il vous ouvre le cœur, vous oblige à réfléchir à votre comportement.
Déjà avec EVA vous mettiez en scène un personnage féminin, jeune, qui vient créer de la perturbation dans la vie des autres protagonistes de l’histoire.
C’est vrai. Dans les deux films, la vérité est souterraine. Et quelqu’un se doit de la mettre à jour, de créer une catharsis. J’aime beaucoup la force des jeunes femmes de la nouvelle génération. Alors que pendant des siècles, le leadership a été détenu par des hommes à qui on demandait d’être forts, de ne pas afficher leurs sentiments, il me semble qu’autre chose est en train d’émerger avec ce leadership de femmes qui ne craignent pas de faire face à leurs peurs.
Une large partie du film se passe dans un aéroport. Le « film d’aéroport » est presque un genre en soi. En quoi cet espace vous intéressait-il ?
Dans mes films, l’architecture a toujours une part importante parce qu’elle structure le personnage. Et là d’autant plus que, ce terminal, c’est le personnage qui l’a dessiné. L’aéroport, c’est ce lieu qui n’appartient à personne où, a priori, on ne fait que passer. Et en même temps, c’est un endroit très important pour une ville : un peu comme les cathédrales autrefois, cela démontre sa puissance. C’est la première couche qu’on aperçoit d’une métropole. Et, en même temps, c’est un endroit dont l’élégance cache quelque chose d’un peu vide... Après, le roman ne se déroule que dans un aéroport. Nous avons dû rendre cela cinégénique, en créant différents espaces, différentes ambiances. Ce n’est pas un hasard si la confrontation entre les deux personnages a lieu dans les toilettes qui est le lieu où on se cache...
A Perfect Enemy de Kike Maíllo |
Vous représentez Paris d’une façon assez particulière. Pour être clair, on n’est pas vraiment dans EMILY IN PARIS ! Effectivement, j’avais plutôt envie d’en donner une vision nostalgique. Une ville dont ne se dégagent ni couleur, ni joie. Je la montre pluvieuse, parfois déplaisante avec ses bouchons. Une ville qu’on a aimée dans le passé, dans laquelle on a des souvenirs mais qu’il faut désormais fuir...
Amélie Nothomb a-t-elle vu le film ?
Non seulement elle l’a vu, mais elle m’a envoyé un mail incroyable. Elle a trouvé que les changements que nous avions apportés fonctionnaient bien. Alors que parfois, certains auteurs peuvent être interventionnistes dans l’adaptation de leurs œuvres, cela n’a pas du tout été son cas, il n’y a eu aucun problème. Je crois qu’elle a perçu que bien que nous ayons opéré certains changements, nous étions profondément respectueux de son œuvre.
Acteurs : Athena Strates, Tomasz Kot, Dominique Pinon
Sortie le 29 décembre
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