#Mode Fast Fashion : Comment la mode rapide détruit la Terre et tue les gens

Fast Fashion 


Fast Fashion, une industrie délétère 

Les dessous peu ragoûtant de la mode à bas prix

mardi 9 mars à 20.50
Disponible sur arte.tv du 02/03/2021 au 06/06/2021


En quelques décennies, la fast fashion, ou mode jetable telle celle pratiquée par H&M, Zara ou PrettyLittleThings avec des robes à 15 euros, a révolutionné l’industrie textile. Enquête dans les coulisses d'un secteur qui ne connaît pas la crise à l'opposé des fastes de la Fashion Week.

Des conditions de travail misérables et une empreinte carbone dévastatrice

Renouveler en permanence sa garde-robe sans se ruiner : rien de plus simple aujourd’hui. Tandis que les marques qui font le pari de vendre exclusivement en ligne se multiplient, l’achat de vêtements tient désormais pour beaucoup d’entre nous du loisir à part entière. Une tendance entretenue par les nouveaux acteurs de la fast fashion sur les réseaux sociaux qui, via un marketing subtil, rémunèrent les influenceurs pour placer leurs produits. Ces dernières années, des marques d’ultra fast fashion se sont même lancé le défi de produire et de livrer encore plus vite et moins cher que les vendeurs traditionnels. Mais leur efficacité se paie au prix fort. En Grande-Bretagne, ces vêtements sont fabriqués dans des ateliers insalubres par des ouvriers payés la moitié du salaire minimum. Au-delà de son impact social, la fast fashion, deuxième industrie la plus polluante au monde, a aussi un coût environnemental. Même quand ce modèle industriel promet de s’amender en proposant une mode plus durable, sa facture écologique reste lourde.


Fast Fashion 


3 euros de l'heure 

Alors que 56 millions de tonnes de vêtements sont vendues chaque année dans le monde, les journalistes d’investigation Gilles Bovon (Starbucks sans filtre) et Édouard Perrin ont enquêté sur l’impact social, environnemental et sanitaire de ce secteur en plein boom. En Europe, aux États-Unis et en Inde, ils ont rencontré des acteurs du secteur − anthropologue, professeur d’économie, chercheur en neuromarketing… − et se sont infiltrés au cœur de l’industrie textile. Au Royaume-Uni, ils ont pu filmer des ateliers de fabrication illégaux et interviewer des personnes qui ont côtoyé de près la fast fashion (ex-styliste, influenceuse mode, ancien associé du fondateur de Zara...). Riche de témoignages, leur film dresse le bilan trop peu écoresponsable d’une industrie qui brasse des milliards.

Documentaire de Gilles Bovon et Édouard Perrin (France, 2020, 1h30mn



Interview de Édouard Perrin  : le règne du pret à jeter

Dans cette enquête alarmante sur l’industrie de la fast fashion cosignée avec Gilles Bovon, le journaliste Édouard Perrin constate les dégâts sociaux et environnementaux causés par un secteur en plein essor.




Quelle découverte vous a le plus interpellé lors de votre enquête ?
Édouard Perrin : La fast fashion, qui consiste en un renouvellement très rapide des collections, a fait accélérer toute la mode classique, si bien qu’on en est aujourd’hui à l’ultra fast fashion. Elle a presque inversé, avec une rapidité surprenante, la tendance de ces cinquante dernières années à fabriquer les vêtements dans des pays du tiers-monde. En effet, certaines marques ne peuvent plus attendre des livraisons depuis l’Asie tant le système s’est accéléré. Elles ont donc réimporté des ateliers en Europe de l’Est, en Turquie et en Grande-Bretagne notamment, où les conditions de travail et les salaires des ouvriers sont à peu près dignes de ce qui se passe dans les pays pauvres. J’ai rencontré des acteurs du textile britannique qui me disaient avoir arrêté de s’approvisionner à Leicester parce qu’ils savaient ce qu’il s’y passait. Ils affirmaient avoir moins de difficultés à surveiller leurs usines au Bangladesh !



Vous évoquez les impacts sociaux de la fast fashion. Qu’en est-il des conséquences environnementales ?

Aujourd’hui, vous pouvez, en restant chez vous, commander des vêtements quasiment sans vous en rendre compte et très rapidement via les différentes plates-formes ou les réseaux sociaux. On a réduit ce que les spécialistes du marketing appellent les "frictions", c’est-à-dire tous les moments qui pourraient freiner l’acte d’achat, pour faire consommer plus. Comme les vêtements sont moins chers, leur quantité vendue chaque année a explosé. Les filières de recyclage sont littéralement étouffées par la masse de textile à gérer. On a beau mettre nos vêtements usagés dans des bennes, s’ils ne sont pas suffisamment solides pour être réutilisés, ils ne seront pas recyclés. Ils le seront peut-être pour fabriquer autre chose, mais les dispositifs techniques sont soit non écologiques, soit non économiques.



La législation ne freine-t-elle pas ces dérives industrielles ?
Il existe des textes sur les responsabilités des multinationales. Mais, du fait de l’addition de nombreux sous-traitants, une marque peut toujours affirmer n’être pas responsable de ce qui se passe dans les ateliers de tel ou tel intermédiaire qui collabore avec elle. C’est justement pour pallier l’absence de législation que les ONG, avec lesquelles nous avons travaillé, ont forcé les marques à donner des informations sur leurs chaînes d’approvisionnement, lors de nombreuses campagnes. Certaines s’y prêtent plus que d’autres. Zara, par exemple, refuse de dévoiler le nom de ses fournisseurs.

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