Synopsis
Un corps retrouvé sur une plage, un employé de sauna, un douanier peu scrupuleux, un prêteur sur gage et une hôtesse de bar qui n’auraient jamais dû se croiser. Mais le sort en a décidé autrement en plaçant sur leur route un sac rempli de billets, qui bouleversera leur destin.
Arnaques, trahisons et meurtres : tous les coups sont permis pour qui rêve de nouveaux départs…
Note 4/5. A la fois film noir et comédie grinçante, au récit complexe, astucieux et très bien maîtrisé, le premier long-métrage de Kim Yong-hoon maintient un suspense constant grâce aux rebondissements. Film visuellement beau avec un remarquable travail sur les couleurs.
Entretien avec le réalisateur KIM Yong-hoon
Lucky Strike est basé sur un roman japonais avec une ambiance japonaise très spécifique. Qu'est-ce qui vous a attiré dans ce livre ?
Dans le roman, j'ai été fasciné par l’histoire de toutes ces personnes à ce point liées entre elles par l’argent : le livre, à travers cette multitude de personnages, se déroule au moment où la forte
croissance économique s’arrête net au Japon et décrit finalement les méfaits du capitalisme.
Comme cette situation se reproduit actuellement de manière identique dans la société coréenne, j'ai pensé que cette histoire pouvait aussi intéresser ce public.

Vous utilisez une structure composée de chapitres : c’est pour garder un lien avec la littérature ou c’est une façon supplémentaire de tromper le public, puisqu'elle établit un rythme chronologique alors que l'intrigue est, elle, déstructurée ?
Le récit est assez complexe, j'ai donc utilisé ce dispositif pour donner des repères, pour que le public puisse plus facilement suivre les événements. Cela atténue la confusion qu'il pourrait
ressentir au fil de la découverte des nombreux personnages. Avec cette structure, j’ai aussi voulu créer un effet rythmique au montage.
Si nous avions raconté cette histoire de manière linéaire, l’intrigue aurait été trop prévisible, donc ennuyeuse. J'ai voulu la rendre imprévisible tout en laissant au spectateur le plaisir d'assembler
dans sa tête les différentes parties du puzzle, avec toutes les astuces narratives que permettent ce genre de récits "dans le désordre".
C’est le personnage de Yeon-Hee, la tenacière de bar (interprétée par JEON Do-Yeon) qui, vers le milieu de l’histoire, vient à la rencontre d’autres personnages principaux (Mi-ran la femme battue, Tae-young le fonctionnaire de l’immigration, Joong-man l’employé du sauna). C'était amusant de créer une nouvelle tension en faisant entrer ce personnage fort dans les différents univers des
autres protagonistes. Sans compter ce que ça amenait au principe de puzzle dont je vous parlais.
Et en partageant le film en deux parties avec l'apparition de Yeon-hee, je pouvais concentrer la première moitié autour du processus qui amène chaque protagoniste à s’avilir par appât du gain,
et la seconde à montrer comment ils en arrivent à devenir des monstres, encore plus vicieux.

Lucky Strike combine des éléments de film noir et de comédie grinçante. Comment ces genres peuvent se renforcer mutuellement ?
Dans ce film, les événements se compliquent de manière exponentielle, et plus quelqu'un tente de résoudre les problèmes, plus ils empirent. La maladresse générale des principaux protagonistes quand ils se retrouvent impliqués dans des crimes ajoute effectivement un élément de comédie grinçante.
Personnellement, j’aime beaucoup cette interaction entre la tension et l'humour, et je pense que cette combinaison de registres est idéale : le contraste accentue la gamme des émotions que
traversent le public. Avec ce va-et-vient entre comique et suspense, non seulement elles deviennent plus fortes, mais je trouve aussi que ça renforce la cruauté des situations.

L'une des composantes majeures des films noirs est la stylisation visuelle. Pourriez-vous nous parler de votre travail avec le directeur de la photographie, KIM Tae-Sung ?
Le concept général était d’employer une lumière différente pour chaque personnage : Yeon-hee en blanc, Tae-young en bleu, Jin-tae (le jeune clandestin chinois) en violet, Mi-ran en orange, etc...
Je voulais aussi que chaque logement puisse immédiatement représenter le personnage qui y habite. À travers l'éclairage conçu dans cet espace, je voulais montrer les différentes psychologies.
Mais comme malgré tout, je pense que tout vient des personnages, une fois ce cadre visuel défini et posé, je me suis donc surtout concentré sur les situations et leurs émotions.
Revenons au personnage de Yeon-Hee : votre objectif était-il de déconstruire le mythe de la "femme fatale" ?
Bien que ce film n’ait pas une approche sur des problématiques de genre, j’avais aussi le désir de faire un film avec des personnages féminins forts.
D’habitude, dans les films noirs, les hommes sauvages et violents ont tendance à être mis en avant, tandis que l’image de la femme est souvent représentée par celle d’une "femme fatale" séduisant
les hommes. Je voulais briser ce préjugé avec le personnage d'Yeon-hee, qui s’attaque en fait à tout le monde, sans distinction. Je voulais en faire un personnage implacable, comme le requin-taureau, qui mange même ses frères et sœurs : puisque la plupart des films noirs parlent du monde des hommes, j’ai pensé que ce serait amusant que ce soit une femme puissante qui contrôle cet univers masculin.
Liste artistique
Jeon Do-yeon
Jung Woo-sung
Bae Seong-woo
Youn Yuh-jung
Sortie le 8 juillet
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