Le déserteur. Un film atypique. Un imitateur de Charlie Chaplin lutte pour survivre dans une Amérique sauvage
Synopsis
Quelque part dans le monde, une guerre fait rage. Terrifié à l’idée d’être mobilisé, Philippe a fui Montréal pour se réfugier dans un Ouest américain aussi sauvage qu’hypnotisant. Il vit tant bien que mal de concours d’imitation de Charlie Chaplin. Mais la cruauté de l’humanité ne se limite pas aux champs de bataille, et Philippe ne va pas tarder à découvrir la face obscure du rêve américain.
Note 3/5. Ce film est visuellement beau : de très belles images, une lumière, des sons très travaillés. Film esthétisant qui peut fasciner, et déroutant par son symbolisme simpliste.
Romain Duris et Reda Kateb font des apparitions remarquées.

Critique
Le déserteur est le quatrième long métrage de fiction de Maxime Giroux. Il est sorti au Québec sous le nom de La grande noirceur. Philippe fuit la guerre. Après avoir participé à un concours d’imitateurs de Charlot qu’il dira avoir gagné, il se retrouve dans le désert, toujours costumé en Charlot. Il est pris en stop par un homme affable qui dit qu’il est imprésario, qu’il pourra le faire travailler. Puis, dans une sorte de village de western fantôme, il est invité par une dame qui s’avère être un personnage vénéneux ; elle traite comme un chien, au sens propre, une jeune femme. Celle-ci, bâillonnée et enchaînée, est obligée de rester à quatre pattes et doit manger en lapant. Philippe-Charlot est ensuite retenu prisonnier et torturé par le chef d’une bande qui semble faire du trafic d’humains. Parfois il peut téléphoner à sa mère pour lui dire qu’il se sortira de sa situation.
L’univers du film est onirique, symbolique, et politique. Il ouvre sur un extrait d’un monologue de Chaplin dans Le Dictateur : «On veut tous aider les autres, l’être humain est comme ça : on veut se faire du bien, pas se faire du mal, dans ce monde y a de la place pour tout le monde ». Cette déclaration très optimiste est totalement démentie par le vécu du personnage pendant tout le film. Seul le personnage Philippe-Charlot est sensible, mais faible ; il symbolise le pacifisme (la référence au film Le dictateur est explicite), c’est aussi le côté positif de l’Amérique. Le reste du monde est violent, exploiteur, la nature sauvage.

Au jeu des symboles, on peut interpréter le concours d’imitateurs de Charlot comme la métaphore d’un conseil de révision où tous les hommes sont des Charlots, la femme-chien prisonnière comme le symbole de la soumission, Philippe emprisonné dans de la boue comme un soldat embourbé dans un trou de bombe, le représentant de commerce en cigarettes comme le symbole de la société de consommation…
Le discours pacifiste est parfois plus explicite, comme ces célèbres et terribles images d’archives de gueules cassées de la première guerre mondiale.
Un discours politique
Le scénariste Simon Beaulieu nous une clé pour une lecture politique du film : «Le rêve américain a deux facettes, une positive et une autre plus sombre. Chaplin représente le côté positif. Une époque où le rêve américain était porteur d’espoir. Aujourd’hui, ce rêve américain s’étouffe lui-même dans ses contradictions et ses violences inhérentes. Chaplin incarnait ce côté lumineux et c’est pour ça qu’il se fait autant malmener. Comme si la part obscure de l’Amérique attaquait son côté lumineux. »Le réalisateur Maxime Giroux précise : «Il ne s’agit pas de faire un constat simple empreint d’un anti-américanisme primaire, mais plutôt de mettre face à face les deux côtés de l’Amérique dans un personnage-symbole dont le combat est celui pour la vie. »

Le déserteur est un film déroutant, atypique. C’est un beau film à voir, pour ses beaux paysages (ou décors ?), la lumière magnifique (les ciels en particulier), des sons très travaillés (bruits des pas dans la neige, sur des cailloux, sur un plancher).
Liste artistique
Martin Dubreuil Philippe
Romain Duris Lester
Sarah Gadon Helen
Reda Kateb Hector
Cody Fern Vendeur itinérant
Soko Rosie
Buddy Duress Concurrent
Luzer Twersky Client
Sortie le 3 juillet
Commentaires
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