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Les héros ne meurent jamais Heroes don't die de Aude Léa Rapin avec Adèle Haenel |
La semaine de la critique a sélectionné 11 longs et 10 courts sur 1605 courts métrages reçus et 1050 longs métrages visionnés.
Parmi les 11 longs métrages de la sélection, huit premiers films et trois seconds.
3 séances spéciales marquent 3 temps forts de cette édition.
Avec Litigante, Franco Lolli dresse le portrait d’une femme qui doit faire face à des situations complexes et urgentes, aussi bien dans sa vie professionnelle, familiale et personnelle. Dans la veine de Pialat, Franco Lolli creuse un sillon dont l’exigence formelle transcende le cadre réaliste de son récit pour atteindre le plus profond des êtres, au cœur des émotions les plus vives et les plus pures, que seul le cinéma sait transmettre. Dans son premier long métrage, Les héros ne meurent jamais, Aude Léa Rapin bouge les frontières et questionne nos convictions. Un jeune homme un peu fou se vit comme la réincarnation d’un autre. Son amie cinéaste le croit et lui fait cadeau d’un film. La réalisatrice témoigne d’une originalité formelle saisissante, jouant avec brio des codes de la fiction et du documentaire. Aux côtés d’Adèle Haenel, le film révèle un acteur impressionnant, Jonathan Couzinié. Geste bouleversant d’une comédienne révélée par Abdellatif Kechiche dans La Graine et le mulet, Tu mérites un amour est le premier long métrage de Hafsia Herzi. Au-delà des vibrations d’un amour et de ses aléas, la jeune réalisatrice nous offre le portrait décomplexé, saisissant de liberté, d’une héroïne qu’elle incarne avec sobriété, profondément ancrée dans la vie. Entourée de ses proches, une galerie de personnages qu’elle fait évoluer avec grâce, Hafsia Herzi témoigne avec maturité d’un parcours qui touche à l’universel, celui d’une femme en quête d’amour.![]() |
A White, White Day |
Les 7 longs métrages de la compétition
Surprenant premier film du marocain Alaa Eddine Aljem, Le Miracle du Saint Inconnu modernise
les codes du western et des croyances populaires. Un voleur en cavale enterre son butin dans le
désert pour le récupérer plus tard. Les villageois construisent un mausolée dessus, lieu de culte
qui permet à la région de prospérer. Le cinéaste observe avec amusement et tendresse le manège
de ses personnages pour tirer profit de la situation, un burlesque détonnant. Après un premier film choc, Winter Brothers, le réalisateur islandais Hlynur Pálmason confirme son talent de mise en scène avec le magistral A White, White Day. Un homme affronte la perte brutale de son épouse dans un accident et soupçonne son infidélité. Ravagé par le doute et la soif de vengeance, il plonge jusqu’au malaise les êtres qui l’entourent dans une rage aussi incontrôlable que salvatrice.
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J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin avec la chanson de Laura Cahen |
Le film français de la compétition marque le retour de Jérémy Clapin à la Semaine de la Critique après son court métrage d’animation Skhizein présenté en 2008. Dans J’ai perdu mon corps, son premier long, la main tranchée d’un jeune homme s’échappe, bien décidée à retrouver son corps. En conjuguant différents rythmes et tonalités, entre frénésie du vivant et douceur contemplative, Jérémy Clapin signe un film d’animation d’une grande modernité.
Nuestras Madres, premier film du Guatémaltèque César Díaz, revient sur un épisode tragique de son pays, les disparus de la dictature militaire, drame qui a concerné de nombreux pays d’Amérique Latine. Il le raconte à travers un jeune homme qui aide des femmes à retrouver et identifier des disparus tout en recherchant son père. D’une intense sobriété, d’une simplicité bouleversante, le film redonne une dignité à tous ces visages blessés et humiliés.
Vivarium, deuxième long métrage du réalisateur irlandais Lorcan Finnegan, est une plongée implacable dans un huis clos fantastique. La vie d’un jeune couple bascule lorsqu’il est piégé dans un monde surréaliste. Prisonnier de son destin, le duo captivant incarné par Imogen Poots et Jesse Eisenberg engendre une profonde réflexion sur le cycle de la vie.
Abou Leila, premier film algérien d’Amin Sidi-Boumédiène, à partir de la quête de deux hommes et d’un terroriste en fuite, nous replonge avec force dans les années noires de la guerre civile qui a déchiré le pays au milieu des années 90. Cette traversée du désert, qui a le souffle des grands films d’aventure, se double d’une exploration mentale, au cœur de la folie. Abou Leila est un cauchemar solaire, d’une puissance tragique.
Découverte à la Semaine de la Critique en 2017 avec son court métrage Selva, la réalisatrice costaricaine Sofía Quirós Ubeda revient avec son premier film Ceniza Negra. Une adolescente élevée dans la campagne par ses grands-parents apprend la vie à l’approche de leur mort. De cette dualité nait la puissance du film, son authenticité. Avec la perte de l’innocence vient la conscience du corps, de sa sensualité et le film déroule avec grâce le charme magique des moments précieux du quotidien.
Pour clore cette 58e édition de la Semaine de la Critique, un véritable coup de cœur, le premier volet d’une trilogie, Dwelling in the Fuchun Mountains, premier film du jeune prodige chinois Gu Xiaogang. La destin d’une famille s’écoule au rythme de la nature, du cycle des saisons et de la vie d’un fleuve. La fluidité parfaitement maîtrisée du cadre et de la mise en scène insuffle au film une respiration sereine qui célèbre la fusion de la condition sur terre et de l’éternité des paysages.
Les 10 films de la compétition courts métrages
Conduit par Léo Soesanto, le comité court a sélectionné 10 films en compétition et nous propose deux séances spéciales.Fakh de l’égyptienne Nada Riyadh est l’autopsie impitoyable d’une relation hors mariage, étouffée par le désir et la société. The Manila Lover de la norvégienne Johanna Pyykkö renverse avec malice le regard d’un mâle blanc toxique sur une femme philippine qu’il voudrait conquérir. C’est un même courage qui rassemble ici tous les personnages féminins, que ce soit dans Dia de festa de la portugaise Sofia Bost, chronique intimiste d’une mère célibataire qui se débat pour que sa petite fille ait un bel anniversaire, ou dans Lucía en el limbo, de la costaricaine Valentina Maurel, où une adolescente se débat avec des poux et un harceleur dans un bus.
Le musicien à la recherche desespérée de son art dans Journey Through a Body de Camille Degeye est rattrapé par la réalité, tout comme les héroïnes de Ikki illa meint du danois Andrias Høgenni se heurtent aux déceptions des amitiés à l’heure des réseaux sociaux. Plus largement, c’est l’idée d’oppression, collective ou individuelle et de ses contradictions que l’on retrouve dans tous les films : dans She Runs du chinois Qiu Yang, une jeune gymnaste résiste à l’esprit de compétition tandis que dans Mardi de 8 à 18, la française Cecilia de Arce suit avec humour une surveillante idéaliste se battant contre un système scolaire injuste ; dans Ultimul Drum Spre Mare du roumain Adi Voicu, ce sont les mesquineries de la dynamique de groupe qui font imploser un petit échantillon d’humanité dans un train et c’est toute la masculinité patriarcale qui semble crever au soleil dans Community Gardens du lithuanien Vytautas Katkus.
La Semaine de la Critique continuera d’accompagner ces talents, en leur offrant l’opportunité d’intégrer son programme Next Step, un atelier de formation et d’accompagnement vers le long métrage.
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