The Happy Prince. Rupert Everett acteur et réalisateur d'un biopic flamboyant

Colin Morgan et Ruppert Everett ©Wilhelm Moser 
Synopsis
À la fin du XIXe siècle, le dandy et écrivain de génie Oscar Wilde, intelligent et scandaleux brille au sein de la société londonienne. Son homosexualité est toutefois trop affichée pour son époque et il est envoyé en prison. Ruiné et malade lorsqu’il en sort, il part s’exiler à Paris. Dans sa chambre d’hôtel miteuse, au soir de sa vie, les souvenirs l’envahissent…


Est-ce bien lui celui qui, un jour, a été l’homme le plus célèbre de Londres ? L’artiste conspué par une société qui autrefois l’adulait ? L’amant qui, confronté à la mort, repense à sa tentative avortée de renouer avec sa femme Constance, à son histoire d’amour tourmentée avec Lord Alfred Douglas et à Robbie Ross, ami dévoué et généreux, qui a tenté en vain de le protéger contre ses pires excès ?


De Dieppe à Naples, en passant par Paris, Oscar n’est plus qu’un vagabond désargenté, passant son temps à fuir. Il est néanmoins vénéré par une bande étrange de marginaux et de gamins des rues qu’il fascine avec ses récits poétiques. Car son esprit est toujours aussi vif et acéré. Il conservera d’ailleurs son charme et son humour jusqu’à la fin : « Soit c’est le papier peint qui disparaît, soit c’est moi… »

Note 4/5. Oeuvre flamboyante sur la fin de la vie de 
Oscar Wilde : soin des reconstitutions, très belles images, dialogues de haut niveau, musique remarquable de Gabriel Yared. Le maquillage, le jeu et la voix de Rupert Everett magnifient le dandy dans son crépuscule. Du grand cinéma !


Colin Morgan et Ruppert Everett ©Wilhelm Moser




















Critique 


Le crépuscule d’un dandy

Oscar Wilde, écrivain et homme de théâtre a été célèbre à Londres. En 1895, son homosexualité, connue, n’est plus supportée par la société victorienne. A la suite d’un procès qu’il avait lui-même provoqué, il est condamné à quatorze mois de travaux forcés.
Traumatisé par son expérience de la prison, Oscar Wilde entame une période de déchéance dont il ne sortira pas. Malgré les avertissements de son tuteur Robert Ross (Edwin Thomas) et les menaces de sa femme Constance Wilde-Holland (Emily Watson) de lui couper les vivres, retrouve son ancien amant Lord Alfred Douglas (Colin Morgan).
Des amis lui prêtent de l’argent (ses revenus littéraires étant devenus insuffisants), notamment Reginald Turner, André Gide et Robert Ross. il finit ses jours dans la solitude et la misère, à Paris en 1900.

L’errance finale
Le réalisateur et acteur Rupert Everett nous conte cette errance finale d’Oscar Wilde, de Dieppe à Paris en passant par Naples, après sa sortie de prison.
Oscar Wilde a encore une cour qui le vénère et le maintient à flot ; en particulier Reginald Turner (Colin Firth) auteur anglais, l’un des rares amis à lui rester fidèle. Arborant une moustache en guidon, Firth interprète l’ami fidèle d’Oscar, apportant un peu d’humour et de légèreté dans les moments de détresse traversés par l’écrivain.
Pendant son errance Oscar Wilde récite par bribes son conte Le Prince heureux (The Happy Prince), comme une berceuse mortifère. 




Colin Firth ©Wilhelm Moser

Rupert Everett magnifie Oscar Wilde
La fin de vie de Wilde est historiquement pitoyable. Mais remarquablement maquillé, inspiré, Rupert Everett incarne en le magnifiant un Oscar Wilde décadent, pauvre, et conservant sa vivacité d’esprit et un certain humour ; « Comme saint François, j’ai épousé la pauvreté mais ce n’est pas un succès », « Je meurs au-delà de mes moyens ». 
En plus Rupert Everett passe avec grande élégance de l’anglais au français. La voix de Colin Firth aussi, ajoute son timbre si particulier à celui de Rupert Everett. 
Les décors, naturels, sont splendides ; l’image aux couleurs souvent crépusculaires est en symbiose avec le récit. Everett nous rappelle aussi par des plans magnifiques que Wilde s’intéressa au nouveau courant pictural, le préraphaélisme, né en 1848 à Londres.
La musique de Grabriel Yared est exceptionnelle. Elle complète, presque jusqu’à les confondre la musique de Tchaikovsky.
Pour l'anecdote, on a aperçu Béatrice Dalle en responsable de café-concert.  

Colin Morgan ©Wilhelm Moser
Déchéance à Naples et Mort à Venise
Comment ne pas évoquer le film de Visconti, à trois titres : la baie de Naples versus La plage du Lido, la musique de Tchaikovsky (sixième symphonie) versus celle de Mahler (cinquième symphonie), l’homosexualité dans les deux récits ?

Wilde, Tchaikovsky...et Turing
La musique de Tchaikovsky est bien sûr en résonance avec le récit sur Wilde tant les destins de ces génies sont semblables, tous deux victimes de l’homophobie, à la même époque.
On peut leur associer Alan Turing, qui 50 ans après Oscar Wilde, sera aussi condamné pour homosexualité et conduit au suicide (1954). Wilde fut réhabilité en 2017, Turing en 2013.
Depuis 1967, l’homosexualité n’est plus un crime en Angleterre (depuis 1982 en France) ; il y eu en tout 75 000 condamnations.

Verbatim : Rupert Everett et Wilde
« J’aime beaucoup ses pièces évidemment. Pour moi, jouer Oscar Wilde, c’est comme être à la maison. Il se passe quelque chose entre lui et moi et entre moi et les spectateurs quand j’ai la chance de le jouer. Mais je suis aussi très touché et inspiré par sa vie. Le fait qu’il ait été emprisonné uniquement parce qu’il était homosexuel, ça me bouleverse au plus profond de mon être. » 



©Wilhelm Moser
« Je ne voulais pas écrire un biopic classique. J’avais décidé d’emblée d’aborder l’exil par l’aspect religieux de son histoire et sa fascination pour le Christ. Et puis j’adore les scènes de mort : la chambre mortuaire d’Oscar Wilde me fascine, dans ce petit hôtel, dans une odeur de pisse et de tabac froid. J’adore les ténèbres, la fin du XIXe siècle. Quand j’étais petit, je n’avais en tête que Proust et Oscar Wilde »

Gabriel Yared, une belle carrière de compositeur de musiques de films
Compositeur oscarisé, Gabriel Yared est l’un des musiciens de cinéma les plus respectés au monde.
Il a notamment remporté l’Oscar pour LE PATIENT ANGLAIS d’Anthony Minghella, qui lui a aussi valu un Bafta Award, un Golden Globe et un Grammy.
Né à Beyrouth, il a d’abord travaillé pour des cinéastes français, à commencer par Jean-Luc Godard, puis Jean-Jacques Beineix (37°2 LE MATIN). Il a également composé les musiques des ballets Clavigo pour l’Opéra de Paris, et Raven Girl de Wayne McGregor, pour le Royal Opera Ballet.
Tout récemment, il a signé la partition de JUSTE LA FIN DU MONDE de Xavier Dolan, Grand Prix du festival de Cannes, et LA PROMESSE de Terry George. Il a achevé la musique de MA VIE AVEC JOHN F. DONOVAN de Dolan.
En 2017, il a été membre du jury du festival de Cannes.
Quarante ans de musique de film
En décembre de la même année, il donnait un concert à la Philharmonie de Paris en hommage à ses quarante ans de musique de film, avec le London Symphony Orchestra.
On lui doit les musiques de Sauve qui peut (la vie) de Jean-Luc Godard et Malevil de Christian de Chalonge, et La Lune dans le caniveau de 
Jean-Jacques Beineix.
Gabriel Yared impose sa signature à l’échelle mondiale, en multipliant les collaborations avec Bruno Nuytten (Camille Claudel), Robert Altman (Beyond therapy, Vincent & Theo), Costa-Gavras (Hanna K.), Etienne Chatiliez (Tatie Danielle), Jean-Jacques Annaud (L’Amant), Jean-Pierre Mocky (Agent trouble), Jean-Paul Rappeneau (Bon voyage), Michel Ocelot (Azur et Asmar et Dilili à Paris) et bien sûr Anthony Minghella (avec quatre partitions dont Le Patient anglais, qui lui vaut un Oscar).
Yared se régénère auprès d’une nouvelle génération d’auteurs : Florian Henckel von Donnersmarck (La Vie des autres, co-composé avec Stéphane Moucha), Maïwenn (Le Bal des actrices), Jan Kounen (Coco Chanel et Igor Stravinsky), Angelina Jolie (Au pays du sang et du miel) et Xavier Dolan (Tom à la ferme, Juste la fin du monde, The Death and life of John F.Donovan).
Gabriel Yared est plus que jamais un compositeur voyageur, ouvert au monde, un créateur d’une sensibilité à fleur de peau, dont plusieurs bandes (très) originales font déjà partie de la mémoire collective.
D’après Stéphane Lerouge



Le Prince heureux (The Happy Prince)
Le Prince heureux et autres contes (The HappyPrince and Other Stories) a été publié en 1888. Il est aujourd'hui disponible, entre autres, aux éditions FOLIO Junior. 


Résumé du conte
Une nuit d’automne, une hirondelle, attardée dans sa migration, arrive au-dessus d’une ville dans laquelle se trouve une statue d’un prince décédé. Ce prince, surnommé le «Prince Heureux», était aimé de tous. Sa statue est recouverte de fines feuilles d’or, a pour yeux deux superbes saphirs, et un grand rubis est incrusté sur le pommeau de son épée.
L’hirondelle fatiguée se pose à son côté, admirative devant tant de grâce et de richesse.
Alors qu’elle se repose à ses pieds, elle sent des gouttes d’eau tomber sur son plumage : le prince, qui fut heureux de son vivant dans son somptueux palais, pleure à présent la triste situation de son peuple. De son piédestal doré, il est témoin de toute leur misère. Le bon prince demande alors à l’hirondelle de prendre le rubis de son épée, et de le porter à une jeune femme qui souffre de la faim et dont l’enfant, faute de soins, est victime de la fièvre. Le lendemain, il ordonne à l’hirondelle d’offrir un saphir qui lui tient lieu d’oeil pour assurer les soins d’un grand-père malade. Le second saphir servira à sauver du désespoir une petite vendeuse d’allumettes. Maintenant aveugle, le prince demande à l’hirondelle un peu de son temps pour l’aider à soulager les malheurs de la population de sa ville. Chaque jour qui suit, l’hirondelle prend son envol, avec dans son bec une des feuilles d’or ornant le prince, pour l’offrir à des gens dans le besoin. Au fur et à mesure que la statue se découvre, le peuple du prince retrouve le sourire.
Bientôt, la statue totalement dégarnie est devenue une vulgaire statue de pierre. L’hirondelle s’adresse alors à la statue «Mon prince, je vais devoir vous quitter à présent.» «Tu t’en vas rejoindre les tiens, dans les pays du sud ?» «Hélas mon prince, je n’en ai plus la force, et l’hiver est déjà là. Je vais mourir.» Alors que l’hirondelle s’effondre sur le sol gelé, un craquement sec se fait entendre. Le cœur de pierre de la statue du prince, s’est brisé.
Le matin suivant, les habitants décrètent que cette statue sans ornements ne peut représenter dignement le Prince Heureux. Le corps en pierre du prince éclate en mille fragments lorsqu’il est abattu. Mais ni le prince, ni l’hirondelle ne s’en soucient. Un ange est venu du ciel, touché par leur bonté, et a ramassé le corps de l’oiseau et le cœur brisé du prince. Ils sont, pour toujours, heureux au paradis.


Liste Artistique
Oscar Wilde RUPERT EVERETT
Reggie Turner COLIN FIRTH
Alfred Bosie Douglas COLIN MORGAN
Robbie Ross EDWIN THOMAS
Constance Wilde-Holland EMILY WATSON
La mère de Felice FRANCA ABATEGIOVANNI
Mr Howard ALISTER CAMERON
Mrs Arbuthnott ANNA CHANCELLOR
Maurice Gilbert TOM COLLEY
La responsable du café-concert BÉATRICE DALLE

Sortie le 19 décembre

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