"Sauvages, au coeur des zoos humains" formidable récit ce soir sur ARTE


Sauvages, au coeur des zoos humains


Samedi 29 septembre 2018 à 20h50 sur ARTE
Et en replay jusqu’au 28 novembre 2018

Pendant plus d’un siècle, les grandes puissances colonisatrices ont exhibé comme des bêtes sauvages des êtres humains arrachés à leurs terres natales. Plus d’un milliard et demi de visiteurs ont découvert trente-cinq mille exhibés à travers l’Europe et dans le monde entier, lors d’Expositions universelles ou coloniales, dans des zoos, des cirques ou des villages indigènes reconstitués. Pour la première fois, un documentaire fait ressurgir ce pan oublié de l’histoire de l’humanité. Avec le concours des plus grands spécialistes internationaux, il retrace les destins de six exhibés, s’appuyant sur des archives inédites, des images exceptionnelles et les témoignages de leurs descendants.






Ils se nomment Petite Capeline, Fuégienne de Patagonie (Chili actuel), Tambo, Aborigène d’Australie, Moliko, Kali’na de Guyane, Ota Benga, Pygmée du Congo, Marius Kaloïe, Kanak de Nouvelle-Calédonie Jean Thiam, Wolof du Sénégal. Leur histoire a été sortie de l’oubli grâce au travail des historiens et grâce à la volonté de leurs descendants qui ont voulu leur rendre hommage en témoignant aujourd’hui de ce drame. 



Les récits de leurs destins restituent le phénomène des exhibitions ethnographiques dans leur contexte historique : l’émergence et le développement des grands empires coloniaux. Grâce aux analyses et commentaires des meilleurs spécialistes de la question (Benjamin Stora, Lilian Thuram, John M. Mackenzie, Achille Mbembe, Nicolas Bancel, Nanette Jacomijn Snoep, Gilles Boëtsch, Robert Rydell...), ce documentaire propose de comprendre la façon dont nos sociétés se sont construites en fabriquant, lors de grandes fêtes populaires, une représentation stéréotypée de l’«Autre» pour légitimer la domination coloniale. Aussi, il décrypte comment on est passé d’un racisme scientifique (1850) à un racisme populaire (1930).









C’est l’histoire de... Comme eux des milliers de personnes ont été exhibées. L’histoire a oublié leurs noms. Pour la première fois, leurs descendants ont voulu leur rendre hommage et témoigner.


Tambo, Aborigène d’Australie 

En 1882, l’impresario irlandais Robert A. Cunningham recrute une troupe de neuf Aborigènes: six hommes, deux femmes et un petit garçon, pour une tournée mondiale. Il leur donne des noms simples à retenir : Billy, Tambo, Toby, sa femme Jenny, leur fils Toby junior, Jimmy, Sussy, Bob et Johnny. Aux États-Unis, ils rejoignent en 1883 le cirque Barnum. Les conditions d’exhibitions sont terribles: la troupe est hébergée dans des lieux sordides, ils tombent malades. Tambo a la tuberculose. Les Aborigènes refusent les médicaments. Un an après leur arrivée, Tambo décède, son corps est embaumé et exposé dans le musée Drew Dime. Par la suite, Cunningham se lance dans une tournée européenne : Londres (1884), Berlin, SaintPétersbourg, dans les zoos et les music-halls des grandes villes européennes. Quand ils arrivent à Paris, Jenny, Toby et Billy sont les seuls survivants. Partout où ils passent, le succès est fulgurant. Ils n’ont pas de papiers, pas de permis de circuler, pas le droit de briser le contrat, et sans Cunningham, pas de possibilité de rentrer chez eux. Après trois ans de tournée, on perd leur trace. Seul, le corps embaumé de Tambo a été rapatrié des États-Unis par ses descendants et enterré le 23 février 1994 en Australie. 



Petite Capeline, Fuégienne de Patagonie 

À l’été 1881, Petite Capeline arrive en France avec 10 autres Fuégiens de Patagonie (Chili actuel) - quatre hommes, quatre femmes et trois jeunes enfants - pour débuter au Jardin d’Acclimatation de Paris une tournée européenne d’exhibitions humaines. Dès les premiers jours d’exhibition, les Fuégiens sont affaiblis par les virus occidentaux et par les vaccins qu’on leur fait. Petite Capeline meurt la première, emportée par une bronchopneumonie. Elle est enterrée au cœur du jardin d’Acclimatation. Malgré cela, Carl Hagenbeck, l’impresario allemand qui les a fait venir en Europe, emmène les Fuégiens en Allemagne, en Suisse et en Belgique. Toujours malades, quatre d’entre eux meurent à Zurich. En avril 1882, ils reprennent le bateau pour rentrer chez eux ; il y aura seulement trois survivants. Les Fuégiens ont rapporté une maladie pulmonaire dans la région, qui va décimer leur peuple en 1966. Oubliés depuis plus d’un siècle et après une longue enquête, les corps des Fuégiens morts en Suisse ont été restitués le 12 janvier 2010. Celui de Petite Capeline est toujours au Jardin d’Acclimatation.

Sauvages, au coeur des zoos humains
DOCUMENTAIRE RÉALISÉ PAR PASCAL BLANCHARD ET BRUNO VICTOR-PUJEBET
CO-ÉCRIT AVEC CORALIE MILLER
RACONTÉ PAR ABD AL MALIK
(2018, 1H30)

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