Joueurs, histoire d'une passion dévorante dans le Paris des cercles de jeux


Tahar Rahim et Stacy Martin dans les cercles de jeu
Les Joueurs

Belle interprétation de Tahar Rahim en joueur invétéré et amant fatal.

Titre anglais : treat me like fire  

Synopsis
Lorsqu’Ella (Stacy Martin) rencontre Abel (Tahar Rahim), sa vie bascule. Dans le sillage de cet amant insaisissable, la jeune fille va découvrir le Paris cosmopolite et souterrain des cercles de jeux, où adrénaline et argent règnent. D’abord un pari, leur histoire se transforme en une passion dévorante.

Note 2,5/5. Premier long métrage assez convenu de Marie Monge. Scénario peu travaillé, mais de belles images et une bonne musique ! 

Critique
Ella mène une vie tranquille en s’occupant avec son père du restaurant dont ils sont copropriétaires. Tout bascule quand Abel apparaît dans le restaurant. Coup de foudre pour Ella, pas forcément réciproque, et la voilà suivant cet homme dans une descente dans l’enfer du jeu du Paris nocturne.



Les Joueurs

Amoureuse ... donc idiote

L’histoire de Ella est une belle illustration de l’adage "l’amour rend aveugle", ce qui se traduit dans le film par : parce qu’elle tombe amoureuse, Ella se comporte comme une idiote. Abel se comporte avec elle comme le parfait macho, l’insulte, la vole, la trahit plusieurs fois, mais Ella endure tout cela sans aucun recul ni réaction. Le spectateur, un peu las, a envie de lui dire de se réveiller ! Nous sommes donc en régression par rapport à l’approche, nouvelle et bien venue, non machiste de la femme. Étonnant quand on sait que le film est réalisé par une femme !
Avec un scénario convenu, pas mal de clichés, des scènes d’action minimalistes, ce film nous offre cependant de belles images nocturnes avec un éclairage soigné, et une musique de qualité.

Les Joueurs

Verbatim de la réalisatrice, Marie Monge

L’intention ancienne, la genèse du film, remonte à la première fois où, dans un Cercle, j’ai découvert un monde fascinant, dont j’ignorais l’existence. Mais ce qui m’a donné envie d’en faire un film, ce sont les gens que j’y ai rencontrés, tous ces personnages qui peuplent ce milieu.
Le cercle, au fond, n’est jamais que l’arène.
La première impression quand on pénètre dans un Cercle, c’est qu’on y trouve toutes sortes de gens très différents. Toutes les classes sociales, tous les âges s’y mélangent et y convergent quand le reste de la ville ferme et s’éteint. Il y a ceux qui viennent après avoir fait la fête, les commerçants du quartier, les habitués, des touristes, des gens qui tuent l’ennui, des vrais drogués…
Destruction et autodestruction
Ce qu’attaquent en premier lieu les joueurs, c’est eux-mêmes. Evidemment, ils blessent. Mais ceux qu’ils abîment autour d’eux en cours de route ne sont jamais que des victimes collatérales. Ils n’ont aucun plaisir à détruire, aucune volonté de le faire, juste un gouffre, un abîme en eux. Et la tentation de savoir jusqu'où ils peuvent aller.



Les Joueurs
Les amants maudits

Les Amants de la nuit
de Nicholas Ray, ou encore Bonnie & Clyde de Arthur Penn, des films qui racontent la construction d’un couple, comment deux individus se rejoignent dans une quête commune qui peu à peu les éloigne l’un de l’autre. Sailor et Lula de Lynch est un autre exemple qui compte beaucoup pour moi. Le personnage de Laura Dern est magnifique, extrêmement désirant, elle possède à la fois toute la candeur de son âge – la croyance, la lumière qui vient avec le fait d’être amoureuse, d’y aller, de se sentir vivante – et une vraie lucidité sur qui est Sailor, sur ce que cela implique de suivre ce genre d’homme, quand on est une femme et que l’endroit du danger n’est pas exactement le même que celui de son compagnon. Il est rare que les amants maudits soient racontés comme ça, avec un personnage féminin aussi moteur.

Le visage de Tahar Rahim
Abel est un garçon qui a vécu des choses. Je voulais qu’il soit un peu plus buriné que Tahar, dont les traitssont encore assez juvéniles. Il a fallu lui "construire" un personnage, et ça passait par le nez cassé, les cicatrices, ce qui nous offrait en outre un nouveau visage à filmer. Autant j’ai pensé à Stacy dès l’écriture du scénario, autant pour Abel j’étais inspirée par des gens que je connaissais, sans acteur en tête pendant longtemps. Tahar s’est vraiment emparé du rôle.
Je crois qu’il a pris beaucoup de plaisir à le composer, à lui trouver une démarche, un style. C’était très important, parce que ces mecs là se créent souvent un personnage.

Filmer Paris tel qu’on l’a très peu vu au cinéma
C’est le Paris que je connais, celui de Strasbourg Saint-Denis, du Sentier, de République, le Paris dans lequel je vis et qui est menacé. Les cafés turcs sont en train de fermer, beaucoup de lieux ont changé en dix ans, ils sont remplacés les uns après les autres comme les gens qui traînent là, tous ces gens qui vivent dehors, pas seulement les sans-abris mais les gens qui évoluent et se rencontrent à ciel ouvert. Ça, c’est en train d’être repoussé. Dans tous mes courts métrages, il y a eu cette dimension de filmer les endroits que je connaissais ou que j’aimais, pour les saisir avant qu’ils ne disparaissent. Dans Joueurs, c’est le Paris cosmopolite que j’ai découvert en arrivant de Tours et qui me faisait rêver. Quand j’entends que Paris est une ville fermée, bourgeoise, ennuyeuse, où il ne se passe rien, je ne suis pas d’accord. Ça fait dix ans que je constate que tu peux sortir n’importe quel soir à Paris, il peut se passer un truc. Il y avait donc un véritable enjeu pour moi à essayer de capter le bouillonnement des rues, à prendre le pouls de la ville. Cela implique des choix de décors, un grand travail de repérages, de casting figuration. On voulait que ça vive, que ça vibre. Je trouve ça excitant de placer un vrai film de fiction romanesque sur un territoire brut, presque documentaire.


Liste artistique
Abel Tahar Rahim
Ella Stacy Martin
Ivo Bruno Wolkowitch
Nacim Karim Leklou
Sandra Marie Denarnaud
Diako Jean-Michel Correia
Romain Henri-Noël Tabary

Liste technique
Réalisation Marie Monge
Scénario Marie Monge, Julien Guetta
Directeur de la photographie Paul Guilhaume
Musique originale Nicolas Becker

Sortie le 4 juillet


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